Résidents

Sophie HALART

Crise climatique et paysages : création artistique et défis environnementaux dans le Chili contemporain.

Période de résidence : Septembre 2022 à juin 2023

Discipline(s) : Histoire de l’art

Pays : France / Chili

FELLOW FOCUS

Le séminaire de résidence de Sophie Halart aura lieu le lundi 12 décembre 2022 :

Troubler la Vue: Régimes de Représentation, Eau et Éco-féminismes dans l’Art Chilien Actuel

De nombreux voix issues des Humanités Environnementales appellent depuis quelques annéesà repenser notre rapport cognitif et sensible à l’environnement: un impératif particulièrement urgent face à la crise climatique qui constitue notre contemporanéité et nos possibles futurs. Le domaine de la représentation visuelle se voit, en ce sens, soumis à une série de questionnements sur sa capacité à générer et accompagner des prises de conscience qui permettraient de donner forme à un nouveau rapport à la Terre et aux autres formes de vie. Lors de ce séminaire, je me propose d’explorer l’art contemporain chilien afin d’analyser une sélection de propositions artistiques qui cherchent justement à interrompre et troubler nos mécanismes établis de perception visuelle dans nos rapports à l’environnement. Je me concentrerai sur un corpus d’œuvres explorant le motif de l’eau (son milieu, sa relation au corps mais aussi son absence) et qui, à travers différentes stratégies plastiques et poétiques, tente de mettre en place des formes d’infra ou de contra-visualité, de perspectives submergées et/ou à contre-courant des logiques extractivistes dominant actuellement le champ de la représentation visuelle. Adoptant un cadre théorique provenant d’écrits éco-féministes, j’interpréterai, par ailleurs, ces recherches artistiques comme des gestes de démantèlement des hiérarchies binaires inhérentes à notre rapport à la nature tout comme au genre.

 

Suggestions de la semaine :

Film Patricio Guzmán, Le bouton de nacre (2015)
Le film propose un parcours intrigant sur le thème de l’eau, à la manière de Gaston BachelardL’Eau et les Rêves, 1942), ou encore à la façon de Chris Marker, mais c’est pour mieux évoquer deux épisodes fondateurs du Chili actuel, la disparition, occultée et oubliée, des peuples autochtones, et celle plus bruyante des années de plomb de 1973-1990.

Lecture : Astrida Neimanis, Bodies of Water (2017)
L’eau est l’élément qui, plus que tout autre, lie les êtres humains au monde qui les entoure - des océans qui nous entourent à l’eau qui compose la plupart de nos corps. Explorant les implications culturelles et philosophiques de ce fait, Bodies of Water développe un nouveau mode innovant de phénoménologie féministe posthumaine qui comprend nos corps comme faisant fondamentalement partie du monde naturel, sans en être séparés ou privilégiés.

Image :  Sofía de Grenade, La Gran Salina (2016)

 

Projet de recherche : Crise climatique et paysages : création artistique et défis environnementaux dans le Chili contemporain.

Ce projet analyse l’émergence de nouvelles formes d’engagements artistiques appliquées à l’environnement dans le Chili contemporain. Si l’urgence écologique actuelle a forcé les artistes contemporains à faire face aux limitations inhérentes aux langages visuels et narratifs établis, elle leur a également permis de développer de nouvelles méthodes de création artistique, capables d’engager une réflexion critique sur le changement climatique et ses causes historiques dans la région. Ainsi, le projet étudie l’articulation de quatre stratégies artistiques situées dans le territoire chilien: depuis les déserts du Nord et ses paysages minéraux dominés par l’industrie minière; la Vallée Centrale, saturée et desséchée par l’agro-industrie ; les régions des rivières et des lacs, colonisées par la monoculture d’eucalyptus; jusqu’aux territoires du sud, objets historiques de disputes avec les peuples autochtones. Ces nouveaux engagements artistiques et leur inscription dans les paysages de chaque région proposent de nouvelles méthodes de création artistique: plus matérielles, incarnées et contextualisées. Face à la perte de sens caractéristique de l’Anthropocène, elles ouvrent également un espace pour repenser l’expérience des spectateurs, façonnant ainsi des récits plus collectifs et dialogiques.

Biographie

Sophie Halart est historienne de l’art. Elle travaille actuellement comme Professeur de l’Institut d’Esthétique de la Pontificia Universidad Católica de Chile. Née en France, elle vit à Santiago du Chili depuis dix ans. Elle a un Doctorat en Histoire de l’Art de l’University College London (GB), un Master en Industrie Culturelle de Goldsmiths College (GB) et une double Licence en Histoire de l’Art et Littérature Anglaise de l’Université de York (GB). Sophie a réalisé un travail de recherche postdoctorale sur la maternité, les nouveaux féminismes et la matérialité dans l’art contemporain chilien (2018 – 2021) financé par le fonds de recherche chilien FONDECYT. Actuellement, ses centres d’intérêt académique sont les réponses artistiques à la crise climatique, ainsi que l’émergence d’une éthique affective et orientée vers le soin (“care”) dans l’art contemporain d’Amérique latine.

Bibliographie

2022 [2016] Sabotage Art: Politics and Iconoclasm in Contemporary Latin America (co-edited with Mara Polgovsky). New-York & London: Bloomsbury Academic.

2022 (forthcoming). “Parched Narratives: Rethinking Lament and Ruins in Chile’s Central Valley”, in Within and Beyond Chile: Notes on Contemporary Art and Visual Culture, edited by Florencia San Martin, Carla Macchiavello and Paula Solimano. Amherst: Amherst University Press.

 2022 (forthcoming). “Gestaciones subversivas: maternidad y materialidad en las obras de Liliana Maresca y Ximena Zomosa”, in Intercambios transandinos, edited by Silvia Dolinko et al. Santiago: Ediciones Universidad Alberto Hurtado.

2020. A Water of a Hundred Eyes: Towards an Eco-Feminist Reconfiguration of Water in Recent Chilean Art”, in Liquid Ecologies in Latin American and Caribbean Art, edited by Lisa Blackmore and Liliana Gómez-Popescu. New York: Routledge, pp. 205 – 221.

2019. “Epidermal Cartographies: Skin as Map in Chilean Art (1979-1994)”, Oxford Art Journal (42:3), 283 – 305.

2018. “Liliana Porter’s Wrinkle”, “In Focus” Project, Tate Research.http://www.tate.org.uk/research/publications/in-focus/wrinkle/wrinkles-in-time