Emmanuel DROIT

La Guerre froide a contribué en Europe à la formation de deux systèmes d´alliances antagonistes. Sous la direction et le contrôle de l´Union soviétique, l´Europe centrale et orientale s´est vue imposée entre 1947 et 1953 des cadres politiques, économiques et culturels identiques (on parle à cet égard de « stalinisation »). Afin de sauvegarder « l´ordre socialiste », des conseillers de la Police politique soviétique ont contribué dans chaque démocratie populaire à la création d´organes publiques de sécurité dont la fonction était d´être « les glaives et les boucliers » des partis communistes.

A partir du milieu des années 1950, dans le contexte de déstalinisation, l´URSS encourage derrière le Rideau de Fer le développement de relations bi- et multilatérales entre les « pays frères », ce qui contribua à l´émergence de relations horizontales à l´intérieur du Bloc de l´Est.

En s´appuyant sur des archives est-allemandes et polonaises et en mobilisant l´approche méthodologique de l´histoire transnationale et croisée, ce projet vise à dépasser l´approche nationale sur le communisme et la police politique. La production historiographique sur ce sujet tend à négliger les dimensions transnationales de la coopération entre les polices. Le but de cette recherche est de porter une attention toute particulière aux circulations, aux transferts de savoir, de savoir-faire, de technologie entre les organes de police communistes. Cette recherche ne se réduit pas à une étude des dimensions politiques de la coopération. Elle vise à développer une approche culturelle : au regard du développement croissant de la coopération au cours des années 1970 et 1980, peut-on déceler l´émergence d´une forme de culture commune et d´un sens de la solidarité au sein de cette « Internationale de Tchékistes » ?

Ce projet entend proposer une nouvelle perspective d´écriture de l´histoire du Bloc de l’Est, un nouvel éclairage spécifique sur le processus tant de stabilisation que d´érosion de l´Empire soviétique jusqu´en 1989. Il s´agit in fine non seulement d´analyser la nature et la qualité de cette coopération mais aussi le processus final qui débouche sur un échec : entre 1988 et 1990, les polices politiques communistes n’ont pas pu empêcher la chute du communisme d´Etat en Europe centrale et orientale.

Originaire de Lunéville en Lorraine (1978), Emmanuel Droit a effectué ses études d´histoire à l´université de Nancy 2 avant de réaliser sa thèse de doctorat à Berlin en tant que boursier de différentes fondations allemandes : le DAAD (Office Allemand d´Echanges universitaires) en 2003-2004, la Studienstiftung des deutschen Volkes et la Fondation Hertie en 2004-2005, la fondation du Sénat de Berlin en 2005-2006. Il a soutenu sa thèse d´histoire en 2006 à l’Université de Paris 1 Panthéon-Sorbonne sur la construction de l’homme socialiste nouveau dans les écoles de Berlin-Est : acteurs, pratiques, représentations (1949-1989). Entre 2006 et 2008,  il a enseigné l’histoire-géographie en section franco-allemande Abibac au Lycée International des Pontonniers de Strasbourg. Depuis 2008, il est maître de conférences en histoire contemporaine à l’université de Rennes 2. Entre septembre 2011 et août 2012, il a été boursier de la Fondation Alexandre von Humboldt (bourse de recherche pour chercheurs confirmés).

Ses champs de recherche relèvent d’une histoire politique et socio-culturelle de la RDA et plus généralement de l´Europe centrale et orientale depuis 1945. Il a également écrit des articles sur les liens entre histoire et mémoire collective. Son premier livre sur l’homme socialiste nouveau dans les écoles de Berlin-Est doit prochainement être traduit en allemand.

DROIT, Emmanuel. Vers un homme nouveau? L’éducation socialiste en RDA (1949-1989). Rennes : PUR, 2009. 356 p.

DROIT, Emmanuel. La Stasi à l’Ecole. Surveiller pour éduquer en RDA (1950-1989). Paris : Nouveau Monde Editions. 2009. 250 p.

DROIT, Emmanuel, KOTT, Sandrine (collab.), Die ostdeutsche Gesellschaft. Eine transnationale Perspektive. Berlin : Links Verlag, 2006. 299 p.

DROIT, Emmanuel. Jeunesse allemande et sortie de guerre. Vingtième Siècle, revue d’histoire. 2010, n° 108, p. 99-111.

DROIT, Emmanuel. Mémoires officielles et cultures mémorielles de la Shoah et du Goulag dans l’Europe élargie. Vingtième Siècle, revue d’histoire. 2007, n° 94, p. 101-120.