Conférence de Marc-Alain Ouaknin et Mohammad Ali Amir-Moezzi
31 mai 2016
Conférence

Conférence de Marc-Alain Ouaknin et Mohammad Ali Amir-Moezzi "Comprendre les Écritures,voies d’interprétation des textes sacrés dans le judaïsme et l’islam"

Le mardi 31 mai à 18h00 à l’amphithéâtre Simone Weil

Né à Paris en 1957, Marc-Alain OUAKNIN est rabbin et philosophe. Ses recherches portent sur les enjeux de l’interprétation des textes de la tradition juive, les multiples stratégies de lecture et de mises en scène du sens pour assurer à l’homme les conditions de sa liberté. Ses travaux cherchent à ouvrir, dans la filiation d’Emmanuel Levinas, des perspectives d’étude sur les rapports qu’entretient le judaïsme avec la philosophie, les sciences humaines, la littérature et les arts. Son travail a pour objectif de révéler des dimensions peu connues du judaïsme : l’érotisme du texte, la place fondamentale du questionnement et du renouvellement du sens, le féminin et la nature dansante de la pensée, sans oublier la centralité de l’humour. En témoignent, entre autres, Le livre brûlé (1986), Lire aux éclats (1989), Concerto pour quatre consonnes sans voyelles (1992), Bibliothérapie (1994), La Bible de l’humour juif (2011).

Depuis 2013, Marc-Alain Ouaknin est producteur de l’émission «Talmudiques » sur France Culture

Résumé de la présentation

Le Pardès

La signification des mots et des choses est comme le parfum. Elle se déploie en des harmoniques de sens, en des niveaux de significations multiples, en des liens nouveaux, inattendus, en des intertextualités fécondes, en jeux de mots qui font tourbillonner le sens, rapprochements sonores, graphiques, feux d’artifices de lettres et de nombres, tournoiements anagrammatiques, tout une panoplie de jeux de langage qui font des textes et de leur lecture une expérience à chaque fois approfondie et renouvelée.

Dans la tradition juive, le lieu de ce déploiement un nom, c’est le Pardès, le jardin ou «paradis » du sens, mot qui est déjà en lui-même un jeu de mots, fruit de l’acrostiche des quatre noms qui constituent les niveaux d’interprétation traditionnels : le Pchat, le Rémez, le Drach et le Sod, que l’on traduit généralement par le « sens littéral », le « sens allusif », le « sens interprétatif » et le « sens secret ».

Le mot Pardès est relativement rare dans le texte de la bible hébraïque, n’y apparaissant que deux fois au singulier et une fois au pluriel. Respectivement dans Cantique 4,13, dans Néhémie 2, 8 et dans Ecclésiaste 2,5.

Bien que déjà présent dans le Talmud pour désigner le lieu du voyage initiatique des maîtres qui « montèrent au ciel » (Rachi et Tossefot sur Haguiga 14b), c’est à partir du Zohar (XIIIe siècle) et de ses commentaires que le mot Pardès va acquérir ce sens canonique des quatre niveaux d’interprétation (Zohar, Genèse 26b).

Appuyé sur de nombreux exemples, Marc Alain Ouaknin analysera lors de sa conférence les différentes occurrences de ce Pardès et proposera une analyse de ces quatre niveaux d’interprétation en montrant comment la manière de les comprendre et de les mettre en œuvre est à chaque fois le fruit d’une époque, et toujours différente selon les auteurs qui s’y réfèrent et en font usage.

Mohammad Ali AMIR-MOEZZI est islamologue, agrégé d’arabe, diplômé de l’Institut national des langues et civilisations orientales, et docteur en Islamologie de l’École Pratique des Hautes Études (Sorbonne). Spécialiste de théologie islamique et d’exégèse coranique classique, il est directeur d’études à l’EPHE, où il est titulaire de la chaire « Exégèse et théologie de l’islam shi’ite », et directeur-adjoint du Centre d’étude des religions du Livre/Laboratoire d’études sur les monothéismes (CNRS-EPHE). Il a publié notamment Le Guide divin dans le shi’isme originel (Verdier, 1992; 2e éd. 2007). En 2004, il a signé Qu’est-ce que le shi’isme ?, en collaboration avec Christian Jambet, chez Fayard. La Religion discrète : croyances et pratiques spirituelles dans l’islam shi’ite (Vrin, 2006). Il a dirigé, en outre, le Dictionnaire du Coran (Robert Laffont, 2007).

Résumé de la présentation

Remarques sur l’islam comme religion herméneutique

 L’islam se définit comme une religion du Livre, comme la religion du Livre. Et en effet, ses écritures scripturaires, le Coran et le Hadith, ont joué une centralité considérable dans la constitution de sa pensée, son histoire, sa culture. Il faut préciser que les lettrés musulmans, les représentants de différents courants religieux à commencer par les Shi’ites, ont très vite perçu le caractère énigmatique, voire problématique, de leurs sources scripturaires, le Coran plus particulièrement. Corpus décousu et fragmentaire, dépourvu souvent de toute logique narrative, le Coran a besoin, aux yeux de ces lettrés, d’une exégèse, d’une herméneutique pour devenir intelligible. On interrogera les raisons de ce caractère problématique, le pourquoi et le comment de l’herméneutique. Comment a été professée, sous la lettre, l’existence de plusieurs niveaux de sens contenant l’esprit. Les ressources d’autres cultures (juive, chrétienne, grecque, iranienne, etc.) furent exploitées pour découvrir le ou les sens cachés du Livre. Ainsi l’islam devint très tôt une religion herméneutique s’ouvrant sur de nombreuses disciplines intellectuelles et spirituelles, allant du droit à la philosophie, en passant par la théologie ou la mystique.

 

 >Dépliant

 

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